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Informalité, informalisation. Dialogue franco-italien sur l’actualité de deux concepts



Si en France la catégorie d’informalité a longtemps été réservée aux économies et aux formes de vie des pays du Sud, il n’en va pas de même pour l’Italie, où celle-ci a pu très tôt être envisagée comme une réponse aux déficiences des régulations institutionnelles ou comme l’expression de leur complexité. On se propose d’examiner, à nouveau frais, l’usage des mots informalité et informalisation dans le mouvement de reconfiguration des économies des pays développés et dans le contexte d’un renouveau des perspectives politiques et des théories à la conjonction des enjeux sociaux et environnementaux. Il nous semble, en effet, que sur ces points un dialogue franco-italien s’avèrerait fructueux. D’une part les pratiques et les activités exercées hors des règles et notamment hors du droit ne sont plus totalement inscrites dans les formes traditionnelles d’usages ou dans les relations entre secteurs dominants et secteurs dépendants. Si la dichotomie moderne/archaïque apparait de plus en plus ineffective, il faut aussi noter que le caractère transitionnel du capitalisme contemporain débouche de plus en plus sur des dérégulations mais aussi des absences de repères normatifs en raison de vides réglementaires et de situations d’attentes juridiques. Ainsi les Nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC) et éventuellement le capitalisme de plate-forme ne renouvellent-ils pas ce « domestic system » qui a caractérisé la conjoncture préindustrielle du capitalisme ? Le fermier tisserand, auxquels des négociants fournissaient un travail artisanal, semble réapparaitre dans les figures nouvelles des travailleurs indépendants du secteur des nouvelles technologies et des industries culturelles ; les porosités entre temps de repos ou de loisir et temps de travail, l’indépendance relative des travailleurs des plates-formes ne pourraient-elles relever de la catégorie d’informalité ? D’autre part, l’évidement des dispositifs sociaux, le caractère de plus en plus policier des dispositifs à l’intention des chômeurs et des « désaffiliés », le travail précaire, la précarité endémique (le précariat), ne débouchent-ils pas sur des formes de solidarités et d’organisation ad hoc qui ne sont pas seulement des manifestations de protections dégradées mais aussi l’expression de résistances socio-politiques à travers l’auto-organisation ? Dans un contexte où se conjoignent enjeux environnementaux et enjeux sociaux, certain.e.s ont vu l’occasion d’une remise en question des standards de vie et de protection des classes moyennes, contraintes d’abandonner les formes de vie individualistes et consuméristes qui les caractérisaient jusque-là et de chercher des socialisations et des solidarités latérales susceptibles de nourrir le soutien mutuel, le care et la résistance. Y-a-t-il un rapport entre le concept d’informalisation et le renouveau des formes sociales latérales : associations, coopératives, mutualisme, etc. ?

Dans la vaste analyse qu’il donne du processus d’institution de l’Etat social et de la propriété salariale, R. Castel évoque une piste historique restée apparemment stérile, la piste d’un « social sans Etat ». Plus exactement, il ne donne pour illustration à ce « social sans Etat » que ses expérimentations patronales autour des formes paternalistes, entrepreneuriales du social dont Le Play, en France, apparait comme la figure théorique majeure. Il y a là étonnamment un angle mort, l’oubli d’un continent entier du social, celui qui précisément émerge avec les luttes ouvrières : un social sans Etat autoproduit par les classes populaires ou ouvrières. Dans le contexte de transformation et de dérégulation qui caractérise ce début de XXIe siècle, l’Etat semble être un recours, et l’on défend souvent sa sphère d’influence sociale, alors que, paradoxalement, il apparait aussi comme l’acteur du néolibéralisme. Ne faut-il pas dès lors reconsidérer ce social sans Etat populaire, pensé au demeurant par la plupart des acteurs du mouvement ouvrier naissant ? Et dès lors quel effet cette reconsidération a-t-elle sur les catégories d’informalité et d’informalisation ?

En interrogeant la dimension transitionnelle de la conjoncture on pourra interroger les relations entre pauvreté et informalité, entre précarité et économies domestiques, les conditions de multiplication et d’indétermination du travail (dont entre autres les contrats zéro heure, les stages, le travail gratuit, illégal, externalisé, délocalisé, etc.) mais aussi les nouvelles manifestations de la réciprocité, de la solidarité et de mises en œuvres sociales du soin, les modes d’institution de communs à distance d’un assujettissement aux logiques marchandes ou à l’interface des marchés et des dé-marchandisations, etc. Autant d’espaces, de questions qui bien évidemment n’ont que pour objet d’ouvrir la discussion et n’épuisent pas ceux et celles que nous pourrons rencontrer ensemble à l’occasion de notre journée...

Programme

9h30 - Introduction à la journée

- 10h- 11h30 - Pratiques et usages en situation de précarité.

10h - 10h30 - Domenica Farinella et Fabio Mostaccio : « La dégradation du travail dans le Sud de l’Italie, entre informalité et précarisation ».

10h 45 - 11h15 - Denis Giordano : « Rouler encore.... pratiques informelles dans la réparation automobile »

- 11h30 – 13h - Travailler et échanger

11h30 – 12h - Guillaume Le Blanc : « Pour une "défense du monde vécu". Comment "sortir du travail" par l’activité ? Lecture informelle d’André Gorz »

12h15 – 12h45 - Marie Cuillerai : « Contestations monétaires et monnaie du commun »

- 13h 14h - Déjeuner

- 14h – 15h30 - Reconfigurations économiques et formes de vie alternatives

14-14h30 - Mirella Giannini : « Classes moyennes : pratiques antinomiques en tensions entre pauvreté et sobriété »

14h45 – 15h15 - Patrick Cingolani : « Précarisation, pratiques alternatives. Quel sens à l’informalité ? »

- 15h30 - 16h30 - Soins, solidarités et place de l’institution

15h30 16h - Claire Heijboer : « Expériences et expertises usagères : de l’informalité instituante dans les institutions de la solidarité à la française ».

16h15 – 16h45 Anne Petiau : « Travail de care et systèmes d’entraide entre proches : entre solidarité formelle et informelle. Le cas des proches aidantes rémunérées »

17h – 17h30 Fabienne Brugere : « L’économie domestique. Entre social sans Etat et social avec Etat »

- 17 h 45 – Discussion collective conclusive





Documents

Programme (pdf, 78.1 ko).


Calendrier

  • vendredi 4 octobre 2019, 09h30-18h, L’université Paris Diderot, salle 870 - Bâtiment Olympe de Gouges, place Paul Ricœur, 75013 Paris.


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